Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 100 IA 216



100 Ia 216

31. Arrêt du 18 septembre 1974 dans la cause Barras et consorts contre
Conseil d'Etat du Canton du Valais et Office du tourisme et Société de
développement de Crans. Regeste

    Kurtaxe; Pflichten der Hoteliers.

    1.  Verfahren (Erw. 1).

    2.  Pflichten des Hoteliers, die Kurtaxe einzuziehen, ihren Betrag
der zuständigen Behörde zu überweisen sowie die Taxe aufgrund einer
Zwangsveranlagung selbst zu bezahlen, wenn sie der Gast nicht bezahlt
hat. In welchem Masse kann sich der Hotelier der einen oder andern dieser
Pflichten. widersetzen, indem er sich auf die ungenügende gesetzliche
Grundlage der Kurtaxe beruft? (Erw. 2 bis 4).

Sachverhalt

    A.- La loi valaisanne du 12 mai 1971 sur l'organisation de l'Union
valaisanne du tourisme et des sociétés de développe ment (ci-après: la loi
du 12 mai 1971) prévoit à son art. 8 le prélèvement d'une taxe de séjour
auprès de toutes les per sonnes de passage ou en séjour dans une localité
du canton sans y être domiciliées, sauf diverses exceptions énumérées à
l'art. 9. L'art. 10 précise que cette taxe est perçue par nuitée, avec
possibilité d'un forfait dans certains cas, et que le propriétaire, le
régisseur d'immeubles ou l'exploitant d'un éta blissement concessionné
est responsable du paiement de la taxe incombant à ses hôtes. L'art. 13
rend passible d'une amende de 20 à 2000 fr. quiconque se soustrait au
paiement de la taxe de séjour ou enfreint les règles qui en régissent
le prélèvement.

    Dans sa teneur initiale, un règlement d'exécution édicté par le Conseil
d'Etat le 29 septembre 1971, puis approuvé par le Grand Conseil, disait
à l'art. 45 al. 1 que le montant de la taxe de séjour est au minimum
de 10 centimes et au maximum de 2 francs par nuitée et par personne;
l'art. 49 disposait que la taxe de séjour est perçue par les sociétés
de développement là où elles sont officiellement reconnues comme membres
actifs de l'Union valaisanne du tourisme, et partout ailleurs par cette
Union; chacune de ces sociétés pouvait en vertu de l'art. 46 arrêter le
taux de la taxe qu'elle prélève, sous réserve d'approbation par le Comité
de l'Union. L'art. 50 oblige les hôteliers à tenir un registre spécial des
nuitées et à y porter le montant de la taxe de séjour encaissée auprès
de leurs hôtes, puis à remettre à la fin de chaque mois à la société
de développement un double de la fiche mensuelle. L'art. 55 prévoit une
taxation d'office contre ceux qui ne se conforment pas à ces obligations,
un recours au Conseil d'Etat étant ensuite possible.

    B.- Dans l'arrêt Andersen du 30 janvier 1974 (RO 100 Ia 60 ss.),
le Tribunal fédéral a déclaré à titre préjudiciel, à l'occasion
d'un cas d'application, que cette réglementation était en partie
inconstitutionnelle, pour le motif notamment que le montant de la taxe
de séjour avait été fixé non point par une loi au sens formel, mais par
un règlement du Conseil d'Etat.

    En raison de cet arrêt, le Grand Conseil du canton du Valais a
adopté le 8 février 1974 un décret d'urgence où il a fixé lui-même le
montant de la taxe de séjour. A la même date, il a en outre approuvé un
arrêté du 4 février par lequel le Conseil d'Etat avait apporté diverses
modifications au règlement d'exécution du 29 septembre 1971, pour tenir
compte de certains considérants de l'arrêt Andersen; le changement consiste
notamment en ceci que désormais seules les sociétés de développement
pourront percevoir une taxe de séjour, et qu'il appartiendra au Conseil
d'Etat d'en approuver le taux.

    C.- Ayant eu connaissance de l'arrêt Andersen, dix hôteliers de Crans
se sont volontairement abstenus de remettre à la Société de développement
de cette station le décompte des nuitées pour le mois de janvier 1974,
et ils n'ont pas versé le montant des taxes de séjour encaissées auprès
de leurs clients pour ce même mois. Deux de ces hôteliers se sont après
coup exécutés. Les huit autres, Antoine Barras et consorts, ayant persisté
dans leur refus, le Chef du Département cantonal de l'intérieur leur a
adressé une sommation le 20 mars 1974, mais en vain. Il a alors procédé
contre chacun d'eux, le 5 avril 1974, à une taxation d'office les obligeant
à payer pour janvier 1974 un montant correspondant à celui des taxes de
séjour déclarées pour janvier 1973 (de 54 fr. à 1386 fr. suivant les cas);
chacun était en outre condamné à une amende et au paiement des frais.

    Les huit opposants avaient déjà recouru conjointement au Conseil d'Etat
contre la sommation du 20 mars 1974. Le Département de l'intérieur leur
ayant répondu que ce recours était prématuré, ils en ont alors formé un
second contre les taxations d'office du 5 avril. Ils faisaient valoir
que, jusqu'à l'entrée en vigueur du décret d'urgence du 8 février 1974
pour le moins, la taxe de séjour n'avait pas en Valais de base légale
suffisante. Relevant ensuite qu'après le système du forfait hôtelier
tel que pratiqué par eux, la taxe de séjour n'est pas facturée à part,
ils soutenaient que cette taxe faisait en réalité partie de leurs frais
généraux, qu'ils en étaient donc les vrais redevables, et que dès lors ils
pouvaient refuser de la payer tant que la base légale était insuffisante.

    Par prononcé du 16 mai 1974 notifié le 4 juin, le Conseil d'Etat
a rejeté les deux recours dont il avait été successivement saisi. Il
a considéré que, selon la législation applicable, le débiteur de
la taxe de séjour est la personne de passage ou en séjour dans la
localité, c'est-à-dire l'hôte. C'est lui qui paie effectivement cette
contribution même si le système des prix forfaitaires est pratiqué par
l'hôtelier. Celui-ci est un percepteur assumant en outre une responsabilité
solidaire. Comme par le passé, la taxe était certainement comprise
dans les prix pratiqués par les recourants en janvier 1974; dans ces
conditions, seuls les hôtes auraient pu se prévaloir de l'insuffisance
de la base légale.

    D.- Par recours de droit public du 28 juin 1974, Antoine Barras et
les sept autres hôteliers demandent au Tribunal fédéral d'annuler les
taxations d'office du 5 avril 1974 et le prononcé par lequel le Conseil
d'Etat les a confirmées le 16 mai 1974. Se prévalant de l'arrêt Andersen,
ils soutiennent qu'il était contraire à l'art. 4 Cst. et à l'art. 30
ch. 3 Cst. cant. de leur réclamer une contribution dépourvue de base
légale suffisante.

    Ils reprochent au Conseil d'Etat d'être tombé dans l'arbitraire en
admettant que les hôteliers sont non pas les débiteurs de la taxe de
séjour, mais de simples percepteurs. Pour eux, les hôteliers ne sont
pas seulement responsables de l'encaissement de cette taxe, mais ils
en sont en fait les redevables directs quand ils pratiquent le système
du forfait, la taxe faisant alors partie de leurs frais généraux; ils
peuvent donc invoquer comme n'importe quel contribuable l'insuffisance
de la base légale. Et même s'il fallait les considérer comme de simples
intermédiaires, on ne voit pas pourquoi ils devraient acquitter un impôt
que les débiteurs principaux peuvent refuser de payer en invoquant l'art. 4
Cst. et l'art. 30 ch. 3 Cst. cant.

    Demandé par les recourants, l'effet suspensif a été refusé par
ordonnance présidentielle du 24 juillet 1974.

    Répondant pour lui et pour la Société de développement de Crans,
le Conseil d'Etat conclut au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Le Conseil d'Etat a manifestement statué avec un pouvoir de
libre examen sur le recours collectif dont il était saisi contre les huit
taxations d'office du Département cantonal de l'intérieur. Son prononcé a
donc remplacé ces taxations, tout en les confirmant, et il pouvait seul
être attaqué par la voie du recours de droit public, à l'exclusion des
décisions du Département cantonal de l'intérieur (RO 99 Ia 148 consid. 2
et 598 consid. 2). Le recours n'est par conséquent recevable que dans
cette mesure.

    b) Le recours concerne matériellement des taxations visant huit
administrés différents. Cela n'importe pas; la décision attaquée est
formellement unique et ces huit administrés sont tous recourants.

    c) Les recourants invoquent sans le produire à nouveau un avis de droit
joint à un autre recours de droit public formé par eux et par d'autres
hôteliers de Crans-Montana contre le décret d'urgence du 8 février
1974. Cette pièce ne fait pas partie du dossier et n'a donc pas à être
prise en considération. Elle ne changerait d'ailleurs rien au résultat.

Erwägung 2

    2.- Les recourants ne contestent pas les montants arrêtés par la
taxation d'office dont ils ont été l'objet, pas plus qu'ils n'attaquent
l'amende prononcée contre eux. C'est pour de pures raisons de principe
qu'ils s'en prennent à cette taxation, en soutenant qu'elle était dépourvue
de base légale suffisante. C'est à ce propos qu'ils invoquent l'art. 30
ch. 3 Cst. cant. (référendum législatif obligatoire).

    Après l'arrêt Andersen et l'arrêt rendu ce jour en la cause Bagnoud et
consorts, le Tribunal fédéral ne peut que confirmer que, jusqu'à l'entrée
en vigueur du décret d'urgence du 8 février 1974, la taxe de séjour n'avait
pas de base légale formellement suffisante dans le canton du Valais, ce
qui la rendait inconstitutionnelle. Mais il s'agit de savoir si, dans les
circonstances de leurs cas, les recourants peuvent se prévaloir de cette
inconstitutionnalité. Ils l'affirment, alors que le Conseil d'Etat est
de l'avis contraire. La question litigieuse se ramène à cela. Elle dépend
en partie de l'interprétation de la législation cantonale, interprétation
que le Tribunal fédéral ne peut revoir que sous l'angle de l'arbitraire.

Erwägung 3

    3.- L'art. 8 al. 1 de la loi du 12 mai 1971 dispose que la taxe
de séjour est perçue auprès de toutes les personnes de passage ou en
séjour dans une localité du canton. Selon l'art. 10 al. 3 de la même loi,
l'exploitant d'un établissement concessionné, c'est-à-dire d'un hôtel
notamment, est responsable du paiement de la taxe de séjour qui incombe
à ses hôtes. L'art. 50 du règlement d'exécution l'oblige à établir des
décomptes à ce sujet, et à y indiquer les sommes encaissées auprès de
ses clients.

    Le Conseil d'Etat déduit tout d'abord de ces textes que,
juridiquement, l'hôte est le débiteur principal de la taxe de séjour;
ce n'est pour le moins pas arbitraire. Par son argumentation, il admet
ensuite implicitement que l'hôtelier assume en vertu de la loi trois
obligations. La première, qui en fait un percepteur, est d'encaisser la
taxe auprès de ses clients. La deuxième, que la loi passe sous silence
mais qui résulte naturellement de la première, est de verser à la société
de développement le produit des taxes encaissées. La troisième obligation
intervient lorsque l'hôtelier n'a pas fait payer la taxe à l'hôte; il doit
alors lui-même s'en acquitter, en vertu de sa responsabilité légale. Cette
analyse n'est pas arbitraire non plus; on doit même la tenir pour la plus
raisonnable des constructions juridiques qu'on pourrait imaginer sur la
base des textes applicables.

    L'hôtelier peut s'opposer à l'exécution de la première et de la
troisième de ces obligations en invoquant une prétendue insuffisance
de la base légale, au risque d'être finalement condamné à payer une
amende en plus de la taxe elle-même. C'est pourquoi, dans l'arrêt non
publié Nigg du 20 octobre 1971, le Tribunal fédéral avait annulé une
taxation d'office en matière de taxe valaisanne de séjour, après avoir
reconnu à titre préjudiciel l'inconstitutionnalité de la réglementation
appliquée. Le recourant, qui exploitait un "campmg", s'était volontairement
abstenu d'encaisser la taxe auprès de ses clients, en les considérant
comme n'étant pas valablement obligés. La taxation d'office avait alors
fait intervenir sa responsabilité légale, c'est-à-dire la troisième des
obligations distinguées plus haut.

    Il en va différemment lorsque, ayant encaissé la taxe auprès de ses
clients, l'hôtelier néglige ou refuse d'en verser le produit à la société
de développement. Dans ce cas en effet, la taxe a été payée par les hôtes,
débiteurs primaires. Ils n'en ont point contesté la constitutionnalité et
ne pourraient en conséquence en demander la restitution à la suite d'une
décision postérieure du Tribunal fédéral déclarant, à titre préjudiciel,
que cette contribution n'a pas une base légale suffisante (cf. RO 98 Ia
571 ss.). A plus forte raison l'hôtelier, qui n'a agi qu'en tant que
percepteur, ne peut-il rendre les montants encaissés à ceux qui s'en
sont acquittés. Il lui faut donc verser les taxes perçues à la société
de développement; il ne peut s'y refuser en excipant du fait que ce
versement intervient postérieurement à la décision du Tribunal fédéral,
car cette obligation découle d'un principe autonome et général, consacré
par le droit privé à l'art. 400 CO et valable également en droit public,
selon lequel celui qui a encaissé une somme d'argent pour autrui doit la
lui verser. L'autorité peut procéder à une taxation d'office et fixer par
appréciation le montant des contributions perçues si l'hôtelier n'observe
pas la seconde obligation que la loi lui impose. N'étant pas en droit de
restituer les taxes aux débiteurs primaires et ne pouvant pas invoquer
à son profit l'inconstitutionnalité de cet impôt, il doit payer à la
société de développement le montant des taxes encaissées, tel qu'il a
été fixé par l'autorité.

Erwägung 4

    4.- On se trouve en l'espèce en présence de taxes effectivement
encaissées par l'hôtelier. Pratiquant le système du forfait envers leurs
clients, les recourants prétendent certes qu'en janvier 1974 ils ne
leur ont pas fait payer la taxe de séjour. Mais s'il est vrai qu'ils ne
l'ont pas encaissée séparément, il est non moins certain qu'ils l'ont
néanmoins imposée à leurs hôtes comme élément du forfait, de la même
façon que les mois précédents. Ils disent en effet eux-mêmes que les prix
forfaitaires s'entendent "taxes et service compris", sans faire état
d'aucune autre taxe que la taxe de séjour. Ils doivent donc verser ce
qu'ils ont définitivement perçu à ce titre à la société de développement
sans pouvoir contester la constitutionnalité de la taxe de séjour. Ils
ne sauraient garder à leur profit les contributions encaissées pour le
compte d'autrui. Quant à dire, comme le font les recourants, qu'avec le
système du forfait la taxe de séjour fait partie des frais généraux de
l'hôtelier et que celui-ci en devient le débiteur principal à la place
de ses hôtes, c'est insoutenable juridiquement, même si économiquement
cette manière de voir peut avoir quelque chose pour elle.

    Le Conseil d'Etat pouvait donc statuer en l'espèce comme il l'a fait,
sans violer aucun droit constitutionnel. Le recours doit ainsi être rejeté.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours dans la mesure où il est recevable.